Virginia Oldoïni
Virginia de Castiglione, née Virginia Oldoïni, est surtout connue pour avoir été missionnée pour être la maîtresse de Napoléon III. Mais il serait injuste de ne retenir que cela de cette vie qui fut marquée par un sens photographique terriblement innovant pour l’époque, et nous pouvons considérer cette femme comme étant une des premières figures de la photographie. Elle laisse derrière elle une immense collection de photographies qui ont contribuées à inventer la performance et l’autofiction photographique.

Née à Florence le 22 mars 1837, Virginia Oldoïni est la fille du marquis Filippo Oldoïni Rapallini. Elle devient Contessa di Castiglione à la suite de son mariage, à 17 ans. A 18 ans, alors qu’elle est à peine sortie des couches, elle est missionnée pour être la maîtresse de l’empereur Napoléon III, dans un but politique. La relation entre l’empereur et la comtesse est mise au jour lors d’une balade dans le parc Saint-Cloud. Le double adultère faisant scandale, le comte de Castiglione se voit dans l’obligation de quitter sa femme. La relation entre l’empereur et Virginia de Castiglione dure près de deux ans, défraye la chronique et permet à la comtesse d’accéder aux salons privés d’Europe.
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Elle entre dans le monde de la photographie en juillet 1856, lorsqu’elle se rend à l’atelier des frères Mayers et de Pierre-Louis Pierson. Débute alors une collaboration qui durera près de 40 ans, durant laquelle Pierre-Louis Pierson réalise plus de 450 portraits de la comtesse. Ces portraits peuvent en quelque sorte être considérés comme une des premières formes d’autoportrait photographique ; en effet la comtesse de Castiglione s’occupait elle-même de la mise en scène, en utilisant différents accessoires afin de recréer des personnages ou des scènes ou en choisissant les costumes, les angles et les prises de vue. Ses photographies ont une importance capitale car ses poses sont innovantes et se distinguent des canons de l’époque.

La Castiglione, date inconnue
Cette photographie, brillamment mise en scène par Virginia de Castiglioni qui est ici parée d'une magnifique robe et dont le regard est perçant, est un témoignage de la finesse de l'œil de l'artiste qui sait user de beaux apparats pour créer un personnage et une ambiance.

Photographie de la comtesse de Castiglione, dite à l'éventail, sous le titre de Elvira en 1863, par Pierre-Louis Pierson à Paris
Nous avons ici encore une preuve de la prestance et de l'intelligence de Virginia de Castiglione, qui, alors dans la fleur de l'âge, se met en scène dans une robe impériale. Elle n'est plus seulement comtesse, elle devient presque une divinité.
Lorsque le Second Empire s’effondre, la comtesse connaît alors un déclin. Ne parvenant pas à se détacher de son succès passé, elle réalise 82 photographies dans l’atelier parisien, se parant de ses belles tenues d’antan. Dans ses dernières années, toujours cloîtrée dans son appartement dont elle a fait voiler les miroirs, elle est victime de neurasthénie et misanthropie. L’atelier de Paris cristallise le temps qui passe à travers ses innombrables photographies au fil des années ; la comtesse y met en scène sa beauté, ses succès, sa disgrâce et, à la fin de sa vie, elle y retourne pour témoigner des ravages du temps sur son corps.
Elle meurt dans son appartement de Paris le 28 novembre 1899, alors âgée de 62 ans.

La comtesse de Castiglione, enveloppée de voile et châle en crêpe noirs, 1893
Cette photographie, intense par sa mise en scène et sa couleur, contraste avec les deux autres. Le regard meurtri de l'artiste est saisissant, émouvant, et l'on ne peut s'empêcher d'éprouver une certaine mélancolie en regardant la comtesse qui semble avoir perdu tout son soleil, mais qui trouve encore la force pour mettre en scène les ravages du temps sur son corps.