Bettina Rheims
Forte de sa renommée et de sa notoriété dans le monde de l’image, les photographies de Bettina Rheims sont reconnues pour vouloir interpeller, bousculer et happer le spectateur dans ses représentations. Entre transgression et respect, avec des modèles nus, authentiques, avantagés ou non, sa ligne d’horizon suit avant tout un nouveau regard, et revisite les codes.

Née à Neuilly-Sur-Seine le 18 Décembre 1952, Bettina Rheims est une photographe portraitiste française d’origine juive alsacienne qui a pour singularité de savoir placer son regard à des endroits où peu d’autres le font, sur la question de la femme et du modèle féminin. Après une jeunesse parisienne, et alors qu’elle a un entourage lui aussi ancré dans le domaine artistique ou académique, sa carrière s’ancre très tôt dans le désir de représentations audacieuses, inattendues, voire même parfois incongrues des femmes. En effet, dès 1978, la liberté de ton, de sujet et le repoussement des limites deviendront sa patte.
Sa carrière débute dès lors sur un thème important et une partie peu regardée de la société : les prostituées.
Ses travaux se nourrissent d'intérêts et de cibles diverses : autant des femmes inconnues, des “femmes de Pigalle” que d’autres à la célébrité grandissante, car sous l’objectif, la notoriété importe peu, c’est l’individu qui compte.
Ses premières séries photographiques dans les années 80 s’intituleront entre autres : Female Trouble (1989) Modern Lovers ou encore Les Espionnes ou Kim, durant les cinq années suivantes, soulevant la question du genre, de la transidentité et de l’androgynie.
« À mes débuts, nous ne devions pas être plus de cinq femmes photographes. Nous avons changé l’image de la mode. Par rapport à nos confrères masculins, je crois que nous sommes moins focalisées sur l’allure, la pose du mannequin, le détail de l’ourlet. Nous nous intéressons davantage à la personnalité du modèle : nos photos sont plus incarnées. »
Ainsi munie de l’appareil offert par son mari, Serge Bramly, un rolleiflex, l’objet deviendra son mode d'expression sur la société. Après ces premières séries, Bettina Rheims alterne travail de la féminité et portraits, également dans la publicité féminine, qui lui envie la sensualité qu’elle parvient à transmettre. A côté de cela elle réalise ensuite une exposition sur des animaux naturalisés, Animal en 1982.
​
En 2005, une fois que son mari lui ait raconté l’anecdote d’un voyeur invitant des femmes dans des chambres d’hôtel à Paris afin d’observer la partie préférée de leur corps, Bettina Rheims a l’idée de la série Chambre Close où elle propose à des femmes croisées dans la rue, dans une boutique ou même un bar de se laisser photographier par elle, dans des poses assez affirmées ou osées.
Toujours désireuse d’élargir le champ des références photographiques et du regard porté sur les femmes, sa série Shanghai en 2002 représente des femmes chinoises qui rêveraient de davantage de modernité, à côté d’une culture dans laquelle elles restent malgré elles très ancrées.
Comme un micro pour prendre la parole, Bettina Rheims met sa pellicule au service de celles qui ne sont pas beaucoup entendues.
" La ligne est très mince entre une jolie image et une image où il se passe quelque chose. Il faut qu’il se passe un truc, puis déraper de ce truc et reconstruire autre chose … Je ne veux provoquer qu’un regard ou une interrogation, surtout pas gêner ou agresser. " dit-elle.
Sa dernière exposition en 2014 aux châteaux de Vincennes et de Cadillac s’intéressera aux femmes incarcérées, notamment au nom des Détenues. Ce projet sera soutenu par Robert Badinter (ancien garde des sceaux, homme de lettres et de philosophie qui a lutté pour l’abolition de la peine de mort). Cette immersion dans le milieu carcéral a pour mérite de mettre un peu en lumière la place des femmes incarcérées, le temps d’un projet. Elle tente de redonner un peu de singularité ou d’attention à des femmes qui sont désormais recluses, habituées à vivre en groupe, sans intimité.
​
Plusieurs lieux et évènements à l'international continuent de retracer son travail et de lui rendre hommage : Le Kunsthal à Rotterdam et Moscow House of Photography à Moscou en 2006, le Fotografiska Museet de Stockholm en 2016.
Enfin, en 2007, outre le fait d’avoir réalisé le portrait officiel du Président Jacques Chirac, elle est aussi décorée des insignes d'Officier de la Légion d’honneur pour l’ensemble de son travail.

Dans ses représentations féminines controversées ou audacieuses Bettina Rheims a ici choqué et surpris en 2013 en associant cette jeune femme aux seins dénudés dans une pose lascive avec un portrait officiel de la Reine d’Angleterre. L’artiste oppose en quelques sortes ici deux registres : le sérieux, l’autorité et le politique avec la liberté et la langueur. Cela diffère complètement et crée un décalage avec les codes de comportement attendus.
La deuxième photographie s’intitule Edward V.III et a été présentée en Juin 2011 à Paris. Elle illustre le questionnement de Bettina Rheims sur le regard porté sur les personnes transgenres. En portrait de face, au décor de fond clair, l’objectif se concentre ici sur l’individu, sans jugement. Un non-jugement qui rentre dans la lignée artistique de Bettina Rheims. Le regard semble se poser simplement sur le sujet, légèrement mis avant par le contraste de ton et de lumière.


Une troisième photographie, tirée d’une exposition à Berlin Die Erotik interroge ici peut-être le rôle de la femme, avec un modèle dans une tenue légère, assise sur un canapé les yeux bandés et les jambes écartées. Le sujet ne semble même pas savoir qu’il est pris en photo, à quoi il sert ni même ce qu’il fait à cet instant précis. Il se dégage une atmosphère passive, un peu hébétée.
Sources :
​
Bettina Rheims — Wikipédia (wikipedia.org)
Bettina Rheims: une vie d'images dédiée aux femmes (bfmtv.com)
Bettina RHEIMS … – Plumes, pointes, palettes et partitions (wordpress.com)
Bettina Rheims, une photographe qui a changé l’image de la mode - Madame Figaro (lefigaro.fr)
Exposition "Détenues" de Bettina Rheims (monuments-nationaux.fr)
Bettina Rheims : « En prison, on finit par ne plus se voir » - Le Parisien
Bettina Rheims - Photo - Féminité - Identité sexuelle - Paris Art (paris-art.com)